Cadre de vie
Densité, durabilité et bien-être au cœur des territoires
Dans un contexte marqué par des défis climatiques, sociaux et économiques croissants, l’Observatoire national du cadre de vie (ONCV) propose dans un rapport publié le 11 décembre une nouvelle approche de l’aménagement territorial. Ce document met en lumière la nécessité de placer la qualité de vie au centre des politiques publiques. Pour y parvenir, il invite à reconsidérer les pratiques d’aménagement pour répondre à la fois aux aspirations des citoyens et aux exigences de durabilité.
Loin de se limiter à des aspects matériels, la question du cadre de vie revêt aujourd’hui une dimension subjective qui évolue en fonction des besoins exprimés par les individus et les collectivités. «Le cadre de vie, en tant que notion multidimensionnelle, englobe le milieu physique et humain dans lequel évoluent les individus», souligne le rapport. Cette approche inclut l’environnement naturel et bâti, mais aussi des facteurs immatériels comme le lien social ou l’accès à des services essentiels. C’est ce qu’illustre le baromètre publié par l’Observatoire national du cadre de vie 2024: pour les jeunes de 25 à 34 ans, le pouvoir d’achat est une priorité majeure (47%), tandis que les plus de 65 ans s’attachent davantage à la proximité des services de santé. Cette diversité des attentes, qui varie selon l’âge, la région ou même le genre, souligne la nécessité de projets innovants et inclusifs capables de concilier exigences sociales et environnementales.
Le rapport appelle à une approche globale pour bâtir des territoires résilients: «L’adaptation au changement climatique du cadre bâti constitue un enjeu économique et humain majeur». Dès la conception, une analyse fine des données climatiques et géographiques doit être réalisée: orientation des bâtiments, gestion des circulations d’air, choix des matériaux. Des solutions concrètes émergent déjà, comme les cours d’écoles «oasis», offrant des îlots de fraîcheur, ou les jardins partagés intégrés aux immeubles. Ces aménagements favorisent à la fois le lien social et l’adaptation environnementale. L’urgence de telles transformations est illustrée par une statistique marquante: «Un Français sur cinq envisage de déménager en raison des impacts du changement climatique», dont 10% dans une autre région.
La densification urbaine, lorsqu’elle est maîtrisée, peut être un outil puissant pour concilier urbanisation et qualité de vie. Le rapport cite le projet du quartier de la Cartoucherie à Toulouse. En réaménageant des friches industrielles, ce projet a intégré des logements abordables pour des familles modestes tout en maintenant des espaces verts de proximité. Ce modèle s’appuie sur une mixité fonctionnelle: commerces de proximité, infrastructures sportives, parc central, espaces piétonniers et cyclables. Une connexion à la future ligne 3 du métro renforce cette approche en réduisant les distances parcourues en voiture et en favorisant une vie de quartier dynamique. «Cette approche montre qu’une densité maîtrisée peut être un facteur de cohésion sociale et de durabilité», indique le rapport.
Des habitudes à repenser
La mobilité constitue de fait un autre pilier stratégique exploré par l’ONCV. Les pratiques actuelles, dominées par l’automobile, sont responsables de 16% des émissions de gaz à effet de serre en France. Ces habitudes doivent impérativement être repensées. Le développement de transports en commun, la création de pôles intermodaux et la promotion des déplacements doux s’imposent comme des solutions durables. Le rapport cite l’exemple du réseau ferré comme outil essentiel pour une mobilité plus écologique. En Occitanie, le projet de RER-T (réseau express régional toulousain) illustre cette ambition. Grâce à une augmentation des fréquences de trains et à la modernisation des infrastructures, cette initiative vise à proposer une alternative crédible à la voiture pour les trajets domicile-travail. A terme, elle pourrait réduire de 20% le trafic automobile dans la métropole. Des parkings-relais et des pistes cyclables connectées aux gares complètent ce dispositif.
S’appuyer sur la nature
Le rapport s’intéresse aussi aux solutions prenant appui sur la nature, en insistant sur leur capacité à répondre aux défis actuels tout en préparant les territoires aux mutations futures. Des actions comme la renaturation des espaces urbains, la préservation des sols vivants ou encore la création d’infrastructures végétalisées renforcent la biodiversité tout en offrant des avantages concrets aux habitants. Ainsi, la gestion des eaux pluviales, souvent problématique en milieu urbain, peut être améliorée grâce à des dispositifs comme les noues végétalisées ou la désimperméabilisation des trottoirs. «Ces aménagements permettent de réduire les risques d’inondation tout en constituant des îlots de fraîcheur bénéfiques aux habitants», explique le rapport.
Pour mener à bien ces chantiers, il faudra aussi travailler sur un changement de mentalité. L’ONCV insiste sur le rôle fondamental de l’éducation dans cette transformation. Selon le rapport, sensibiliser les citoyens, et en particulier les jeunes générations, aux enjeux du cadre de vie est un levier indispensable pour pérenniser ces changements. Des initiatives comme des ateliers en milieu scolaire sur la gestion de l’eau ou des projets participatifs pour végétaliser les quartiers sont cités comme des exemples à généraliser. Ces actions permettent d’impliquer les habitants dans les projets d’aménagement tout en renforçant leur sentiment d’appartenance et de responsabilité envers leur environnement. «Il s’agit de passer d’une logique de l’offre à une logique de la demande», a résumé lors de la présentation du rapport Xavier Prigent, vice-président du Conseil supérieur de l’Ordre des Géomètres-Experts.
ONCV: un observatoire pluridisciplinaire pour le cadre de vie
L’Observatoire national du cadre de vie (ONCV) a été créé en en septembre 2019, sous l’impulsion de l’Ordre des géomètres-experts. L’ONCV a pour missions la réalisation d’enquêtes et l’élaboration de réflexions constructives afin d’imaginer des lieux de vie toujours mieux adaptés aux besoins de chacun. Il réunit l’Ordre des géomètres-experts, l’Union nationale des aménageurs, la Fédération des Scot, l’Association française interprofessionnelle des écologues, l’Office français de la biodiversité, le Pôle habitat de la FFB, l’Office professionnel de qualification des urbanistes, l’Alliance HQE-GBC et l’Union nationale des entreprises du paysage.