Avis d’experte
«Anthropocène: il faut réinventer le langage cartographique»
Vous prônez une «révolution verte» de la cartographie. Que faut-il entendre par là?
Karine Hurel: Il faut changer le langage cartographique. Pour représenter le vivant, il faut nourrir les bases de données sur les sols ou la forêt, qui, à elles seules, sont insuffisantes. La cartographie s’est construite autour et au service de la conquête des espaces par l’homme, des guerres et des frontières, avec une représentation zénithale qui place nécessairement l’humain au centre. Il faut désormais s’outiller sur la connaissance du vivant et changer la manière dont on le représente. Sur le terrain, il n’est pas possible de voir les différentes couches du sol, et les cartes vues du ciel confortent cette vision écrasante. Or, la plupart du temps, ce qui n’est pas représenté n’existe pas... et n’est donc pas protégé comme il se doit.
Comment pourraient évoluer les outils cartographiques?
K.H.: Les cartographes doivent s’attacher à trouver des représentations du mouvement et des flux, à travers des plans de coupe ou des transects par exemple. Il faut dépasser les codes de la cartographie zénithale pour trouver un nouveau langage. Les autrices de Terra Forma, manuel de cartographies potentielles (1), travaillent sur ces sujets pour une transformation du monde, avec des pistes de représentation différentes. Mais nous sommes encore prisonniers de notre culture visuelle: la carte vue du ciel est ancrée partout, et en premier lieu, à l’école. Aujourd’hui, les outils cartographiques ne permettent pas de changer la métrique avec cette vision euclidienne du territoire.
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