ABONNEZ-VOUS

Politique
Le gouvernement de Michel Barnier face au défi de la crise du logement

Sous l’autorité du Premier ministre, Valérie Létard et Agnès Pannier-Runacher seront en première ligne pour répondre aux urgences liées au logement et à la transition écologique. La trajectoire ZAN pourrait être réajustée.
Samuel Ribot | Le mardi 1 octobre 2024
Le Premier ministre Michel Barnier prononce sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale le 1er octobre 2024. © A. Jocard / AFP

Après des semaines d’indécision, le 5 septembre dernier a marqué l’annonce de la nomination de Michel Barnier à Matignon. Parmi les ministres du gouvernement, dévoilé le 24 septembre, Valérie Létard et Agnès Pannier-Runacher – respectivement en charge du logement et de la rénovation urbaine pour la première, et de la transition écologique pour la seconde – sont appelées à jouer un rôle crucial. Mais pour en savoir plus sur la feuille de route de ces deux ministres, encore fallait-il attendre le discours de politique générale du Premier ministre. 
Dans un contexte budgétaire rendu très délicat par l’explosion des déficits publics, celui-ci a esquissé, le 1er octobre, lors de son discours de politique générale, la voie qu’il entend suivre en matière de politique du logement. Premier enseignement: l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) risque de connaître des évolutions. «Pour construire, il faut du foncier», a déclaré Michel Barnier. «Nous devons faire évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation zéro artificialisation nette afin de répondre aux besoins essentiels de l’industrie et du logement.» Deuxième axe de travail: la lutte contre la crise du logement. «Dans un contexte de crise du secteur de la construction, il nous faut des mesures rapides pour l’investissement locatif et l’accession à la propriété, notamment chez les primo-accédants.» Le nouveau Premier ministre s’est déclaré «favorable à l’extension du prêt à taux zéro sur tout le territoire».
En matière de construction, le gouvernement entend «simplifier au maximum les normes qui pèsent sur la construction de logements neufs ou la réhabilitation du logement ancien». Concernant le logement social, la vigilance sera de mise: le gouvernement demandera aux bailleurs «d’examiner régulièrement la situation de leurs locataires afin d’adapter les loyers à leurs ressources. C’est aussi une mesure de justice sociale». Dernier chapitre évoqué devant les députés: l’accession sociale à la propriété. Michel Barnier a parlé «de mesures innovantes à trouver avec les offices HLM» et de la possibilité de «donner plus de pouvoir aux maires dans l’attribution et la priorisation des logements sociaux sur leur territoire».

Des dossiers brûlants pour Valérie Létard
A Valérie Létard échoiront donc deux des dossiers les plus brûlants du moment. L’ensemble de la filière du logement est au bord de la crise de nerfs. La construction de logements neufs continue de diminuer: entre juin 2023 et mai 2024, 353.800 logements ont été autorisés, contre 453.800 entre juin 2022 et mai 2023. En mai 2024, les autorisations de construction affichaient une baisse de 29% par rapport aux niveaux d’avant la pandémie de Covid. Parallèlement, les prix des matériaux ont connu de fortes hausses, tandis que les taux d’intérêt des prêts immobiliers s’envolaient au-delà des 4%. Sur le front du logement social, la situation reste extrêmement tendue, avec 2,7 millions de ménages en attente d’une attribution. Le rythme de production nécessaire se chiffre à 150.000 logements par an, alors que la tendance des trois dernières années se situe sous la barre des 100.000 logements. Lors de sa prise de fonctions, Valérie Létard a défini ses priorités en ciblant les «enjeux sociaux», notamment «toutes les questions liées au pouvoir d’achat des ménages», la rénovation énergétique – qui accuse un retard considérable – et les «sujets économiques», avec une attention particulière pour la filière du logement. Un sujet maîtrisé par Valérie Létard, cette proche de Jean-Louis Borloo ayant présidé au Sénat la commission spéciale chargée de la mise en application de la loi climat et résilience.
Sa collègue Agnès Pannier-Runacher aura, de son côté, pour mission de dynamiser la transition écologique, de s’attaquer aux questions énergétiques et de travailler à la prévention des risques. Des synergies évidentes se dessinent déjà entre les deux ministères, qui auront la charge de mettre en œuvre une grande partie des orientations définies par Michel Barnier.