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Assises nationales de la sobriété foncière
En France, la mutation est en route

L’objectif du zéro artificialisation nette est désormais dans toutes les têtes. Mais selon qu’on est aménageur, élu local, chercheur ou professionnel du cadre de vie, sa mise en œuvre peut susciter hésitations et questionnements.
Samuel Ribot | Le mardi 23 juillet 2024
La ville de Cannes (Alpes-Maritimes). © saiko3p / Adobe Stock

La situation en France

• Séance 2
• Multiplex depuis Fort-de-France
• Mercredi 3 juillet, 17h00



En France, le débat sur la sobriété foncière a déjà permis le vote de la loi climat et résilience en 2021. Mais les mentalités évoluent lentement, que ce soit au sein de la société ou même chez les professionnels de l’aménagement des territoires et du cadre de vie. Un mouvement pointé du doigt par Laurent Fuchs, géomètre-expert et président de la séance plénière spécifiquement consacrée à la situation française: «Il est absolument nécessaire que s’opère une prise de conscience. Les géomètres-experts mesurent quotidiennement l’écart qui peut exister entre l’objectif ZAN et les pratiques de terrain. Il est désormais temps d’interroger notre rapport au sol et à la propriété privée». Une réflexion développée à sa suite par le directeur de l’Institut de la transition foncière, Jean Guiony, qui a tout d’abord soulevé un paradoxe: «Alors que notre empreinte carbone a enfin commencé à baisser, notre empreinte foncière, elle, est en hausse!» Or, même si la prise de conscience est encore trop lente, l’importance des sols ne peut plus être contestée, à tel point que ceux-ci doivent devenir «une nouvelle frontière», considère Jean Guiony. Mieux: «Nos sols doivent être considérés comme des milieux à part entière» et bénéficier ainsi d’une réelle protection. Pourquoi pas, propose le directeur de l’Institut de la transition foncière, en s’inspirant des modèles mis en place pour la gestion de l’eau?

Le sol, un domaine mystérieux
Mais au fait, quand on parle de sols, ne faudrait-il pas désormais les considérer comme des communs? La question aiguillonne Marc Kaszynski, président du Laboratoire d’initiatives foncières et territoriales innovantes (Lifti), pour qui «la coexistence de biens privés et de biens communs n’est pas forcément incompatible» avec l’objectif du ZAN, ainsi que le montrent les expériences conduites autour de la séparation du foncier et du bâti. Pour avancer dans cette voie, l’expert en aménagement du territoire estime qu’il est essentiel de «redonner une dimension stratégique aux questions foncières». Mais, pour élaborer une stratégie, encore faut-il être en possession de tous les éléments d’évaluation nécessaires. Or, à ce jour, le sol reste pour beaucoup un domaine mystérieux, «un continent inconnu» estime le microbiologiste des sols Claude Bourguignon, fondateur du laboratoire d’analyse microbiologique des sols (Lams21). Et le scientifique d’alerter: «Nous avons déjà perdu 50% du patrimoine organique des sols et rien n’est fait pour maintenir leur qualité biologique. Comment arrêter cette destruction?» Des exemples existent pourtant: l’Europe s’est en effet dotée de directives sur l’air et sur l’eau, qui pourraient tout à fait inspirer une démarche similaire en direction des sols. En attendant, si nous nous sommes arrogés collectivement et individuellement des droits sur nos sols, nous n’avons en revanche endossé aucun devoir vis-à-vis de leur préservation. Résultat, en matière agricole, nous disposons aujourd’hui de sols agricoles fertilisés par les engrais «mais devenus non fertiles», prévient Claude Bourguignon. L’artificialisation, elle, entraîne une accélération préoccupante de l’imperméabilisation des sols. Prenant en exemple les récentes inondations du nord de la France, le microbiologiste souligne le risque induit: «Il ne pleut pas plus, mais la perméabilité s’effondre!», et le risque augmente mécaniquement. Pour réussir à prendre enfin en compte l’importance des sols, «il est essentiel, selon Jean-Jacques Herin, président de l’Association douaisienne pour la promotion des techniques alternatives en matière d’eaux pluviales (Adopta) et spécialiste de l’amélioration des fonctions hydriques des sols, de sortir d’un mode d’organisation en silos et d’interagir entre spécialités».

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