L’actu juridique – Décembre 2025
Sélection issue de JurisHebdo Immobilier
PERMIS DE CONSTRUIRE
Le maire n’a pas à vérifier le droit du demandeur
CE, 10e et 9e ch. réunies, 28 oct. 2025, n°497933, 497 939, 497 956, 497 957, mentionné aux tables, cassation
En 2022 puis 2023, le maire avait délivré à la société République un permis de construire et un permis modificatif pour un ensemble immobilier. Des voisins ont saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, estimant que la société ne disposait d’aucun droit pour déposer la demande, le terrain relevant du domaine privé communal et aucune délibération ne l’y autorisant.
Par un jugement du 16 juillet 2024, le tribunal administratif a annulé les permis. La société et la commune ont formé pourvoi; le Conseil d’État a joint les quatre affaires.
La haute juridiction rappelle qu’au regard des articles R.423-1 et R.431-5 du code de l’urbanisme, le pétitionnaire doit seulement attester qu’il est propriétaire, mandataire ou autorisé à réaliser les travaux. L’administration n’a pas à en vérifier la validité: les autorisations d’urbanisme sont délivrées sous réserve du droit des tiers. En revanche, si l’autorité dispose d’informations non équivoques révélant une fraude ou l’absence manifeste de tout droit pour agir, elle doit refuser le permis.
L’appartenance du terrain au domaine privé communal est sans incidence: le demandeur produit la même attestation que tout pétitionnaire. En l’espèce, l’absence de délibération municipale ne suffisait pas à établir une fraude ni à exclure la qualité du demandeur. En jugeant l’inverse, le tribunal a commis une erreur de droit. Le Conseil d’État casse le jugement et renvoie l’affaire.
À retenir
L’attestation du pétitionnaire suffit, sauf fraude manifeste. Le maire ne vérifie pas le droit à construire et ne peut refuser le permis qu’en présence d’éléments non équivoques révélant l’absence de tout droit du demandeur.
COPROPRIÉTÉ (1)
Le copropriétaire peut agir seul pour protéger la jouissance de son lot
Cass. 3 civ., 16 oct. 2025, n°23-19.843, FS-B, rejet
Un copropriétaire peut saisir le juge pour faire cesser un trouble de jouissance sans informer le syndic. La Cour de cassation juge que l’obligation d’information prévue par l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 n’est pas une condition de recevabilité de l’action, mais une simple règle de bonne gestion. L’absence de notification préalable ne prive donc pas le copropriétaire de son droit d’agir.
COPROPRIÉTÉ (2)
Vers un régime déclaratif pour accélérer la rénovation énergétique
Sénat, prop. de loi n°881, Marie-Do Aeschlimann
Une proposition de loi LR veut alléger les règles d’autorisation des travaux énergétiques en copropriété. Au lieu d’un vote souvent long en assemblée générale, un régime déclaratif serait instauré: le copropriétaire informerait le syndic, qui aurait 60 jours pour s’y opposer pour des motifs limités (sécurité, conformité, destination). Le copropriétaire resterait maître d’ouvrage. Inspiré des dispositifs d’accessibilité et d’isolation, le texte vise à faciliter la transition énergétique tout en préservant les droits collectifs.
RESPONSABILITÉ DÉCENNALE
Le maître d’ouvrage doit seulement prouver l’implication du constructeur
Cass. 3 civ., 11 sept. 2025, n°24-10.139, n°398 FS-B, cassation partielle
En 2014, des travaux électriques sont réalisés dans une maison. Quelques mois après la réception, un incendie détruit le bâtiment; l’expertise situe le départ du feu dans le tableau électrique. Le maître d’ouvrage et son assureur assignent l’électricien et son assureur au titre de la décennale.
En 2023, la cour d’appel de Toulouse rejette la demande, faute de preuve certaine sur l’origine du sinistre. La Cour de cassation casse: le maître d’ouvrage n’a pas à établir la cause technique précise. Il doit seulement démontrer que le désordre relève du domaine d’intervention du constructeur, ce qui suffit à faire jouer la présomption de responsabilité de l’article 1792 du Code civil. Dès lors que l’incendie a pris naissance dans le tableau électrique, la présomption pèse sur l’électricien, qui ne peut s’exonérer qu’en prouvant une cause étrangère.
L’avocate générale rappelle la vocation protectrice de la décennale: éviter d’imposer au maître d’ouvrage une preuve impossible. En exigeant une certitude technique, la cour d’appel a privé sa décision de base légale.
À retenir
Pas besoin d’identifier la cause exacte; il suffit que le désordre entre dans le champ d’intervention du constructeur. Celui-ci ne s’exonère qu’en démontrant une cause étrangère.
LOGEMENT DES SAISONNIERS
Deux propositions pour répondre aux besoins urgents
AN, prop. de loi Pascale Got (28 oct. 2025) et n°1949, François-Xavier Ceccoli (14 oct. 2025)
Deux députés avancent des mesures pour améliorer le logement des travailleurs saisonniers, essentiels à l’agriculture et au tourisme. Leurs textes prévoient d’intégrer l’hébergement saisonnier dans les documents locaux (PLH, Scot, PLU), d’autoriser les maires à installer des logements temporaires et démontables et de sécuriser ces implantations via les Stecal. Ils ouvrent aussi la voie à des dérogations ciblées à la loi ZAN afin de permettre des solutions adaptées, dignes et compatibles avec la préservation des terres agricoles.
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